L'économie canadienne dépasse les attentes, mais pour combien de temps?
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L'économie canadienne dépasse les attentes, mais pour combien de temps?

May 13, 2023

L'économie s'est avérée plus résiliente que prévu en 2023. Aux États-Unis et au Canada, le PIB a continué de croître au premier trimestre, les dépenses de consommation ayant résisté malgré la hausse des taux d'intérêt et des prix. Les faibles taux de chômage ont persisté et l'inflation est toujours supérieure aux taux cibles de la banque centrale. Les inquiétudes concernant le secteur bancaire régional américain se sont apaisées, du moins pour le moment, et la prochaine bataille sur le plafond de la dette américaine a été repoussée après les élections de 2024.

La guerre en Ukraine se poursuit, mais les coûts de l'énergie ont baissé et les pressions sur la chaîne d'approvisionnement mondiale se sont encore atténuées. La croissance économique de la Chine ralentit, mais il faut maintenant s'y attendre, car les vents contraires démographiques dus au vieillissement de la population augmentent.

La surchauffe des conditions du marché du travail et une importante réserve d'épargne des ménages en cas de pandémie au Canada pourraient retarder le plein impact d'une politique monétaire plus stricte. Mais la flambée des taux d'intérêt au cours de la dernière année continuera de faire des ravages. La hausse des prix et des taux d'intérêt a déjà absorbé la totalité de l'augmentation des revenus salariaux après impôt des ménages canadiens en 2022. Et ils devraient le faire à nouveau en 2023. Nous continuons de penser que les perspectives de scénario de base les plus probables incluent au moins des récessions « légères » au Canada et aux États-Unis, même si nous prévoyons maintenant que les baisses du PIB commenceront un trimestre plus tard (T3 et T4 2023) que prévu.

Le retour de l'inflation aux taux cibles de la banque centrale (2 %) reste tributaire d'un ralentissement de l'économie. Si l'élan récent continue de surprendre à la hausse, la Banque du Canada et les autres banques centrales devront relever les taux d'intérêt plus que prévu. La Banque du Canada a déjà mis fin à la pause dans les hausses de taux d'intérêt qui a commencé en janvier de cette année avec une hausse de 25 points de base en juin. Nous ne pensons pas que la Fed américaine emboîtera le pas pour sa réunion de la semaine prochaine, compte tenu des communications antérieures. Nous prévoyons toutefois que les deux banques centrales relèveront à nouveau leurs taux directeurs de 25 points de base en juillet, à moins que les données économiques ne se détériorent plus que prévu d'ici là. Le seul véritable scénario « d'atterrissage en douceur » est celui où les pressions inflationnistes ralentissent rapidement pour revenir aux taux cibles sans détérioration de l'économie, et cela semble encore peu probable.

Ainsi, même les surprises positives à court terme en matière de croissance ne feront que retarder, plutôt qu'empêcher, un atterrissage « cahoteux ». Même si les prix et les taux d'intérêt plus élevés absorbent une plus grande part du pouvoir d'achat, les consommateurs canadiens continuent de dépenser. Les marchés du logement semblent avoir dépassé leur creux, les reventes de maisons et les prix rebondissant au printemps, et le rapport entre la demande et les inscriptions disponibles se déplaçant en faveur des vendeurs dans une part croissante des marchés. Notre propre suivi des données de carte a montré que les dépenses en produits de première nécessité et autres biens discrétionnaires se sont stabilisées. En revanche, les dépenses de divertissement local comme les sorties au restaurant sont restées très fermes.

Pourtant, bien que les taux de chômage soient exceptionnellement bas, certains signes indiquent que la demande de main-d'œuvre s'affaiblit. Les offres d'emploi sont en baisse de près de 20 % par rapport aux sommets au Canada et de 16 % aux États-Unis.

L'impact des hausses de taux d'intérêt depuis le début de 2022 ne s'est pas encore pleinement répercuté sur les coûts d'emprunt. Mais les taux de délinquance des consommateurs augmentent déjà. Et avec des coûts d'intérêt hypothécaires moyens dépassant de près de 30 % les niveaux d'il y a un an au Canada, nous nous attendons à ce qu'une plus grande souplesse se manifeste à mesure que ces prêts sont progressivement renouvelés à des taux plus élevés. Au Canada, le ratio du service de la dette, ou la part du revenu disponible des ménages absorbée par le remboursement de la dette, atteindra probablement des niveaux records au cours du second semestre de cette année.

Bien que les inquiétudes concernant le secteur bancaire régional aux États-Unis se soient apaisées, les banques signalent toujours dans l'ensemble des conditions de prêt plus strictes. Les marchés canadiens du crédit ont été plus stables cette année, mais ont également vu les conditions de prêt se resserrer.

Les pénuries de main-d'œuvre persistantes signifient que les entreprises seront plus lentes que d'habitude à renoncer aux investissements visant à améliorer la productivité, mais nous nous attendons toujours à un certain ralentissement dans ce domaine à l'avenir. Aux États-Unis, où les conditions de prêt se sont resserrées de manière plus significative, la croissance des livraisons d'usines a ralenti, les prêts commerciaux et industriels ont commencé à baisser légèrement.

La baisse des coûts de l'énergie pousse les taux d'inflation globale à la baisse tant au pays qu'à l'étranger. En mai, les prix de l'essence au Canada étaient encore élevés, mais inférieurs de près de 20 % aux niveaux d'il y a un an. Les coûts de chauffage domestique ont également fortement baissé (juste à temps pour l'été), les coûts du gaz naturel et du mazout ayant également diminué par rapport à il y a un an, lorsque l'invasion russe de l'Ukraine a fait grimper les coûts de l'énergie.

La croissance des prix alimentaires reste élevée mais semble avoir dépassé son pic. La flambée des prix de l'épicerie au cours de la dernière année a été entraînée par une combinaison de chaînes d'approvisionnement étranglées, de la flambée des coûts de transport et de main-d'œuvre et de la hausse des prix des produits agricoles. Tous ces facteurs se sont désormais atténués. Les coûts d'expédition mondiaux ont chuté et les coûts de transport locaux (routiers et ferroviaires) augmentent plus lentement. Les prix des produits alimentaires agricoles sont en baisse de 15 % par rapport à leur sommet de 2022, ce qui les rapproche des niveaux observés pour la dernière fois à l'été 2021.

Bien que les pressions inflationnistes plus larges se soient également atténuées, elles sont encore trop fermes pour que les banques centrales se relâchent. Les mesures de base préférées de la Banque du Canada ont fonctionné à un taux annualisé d'environ 3 ½ %, toujours au-dessus de l'extrémité supérieure de la fourchette cible de 1 % à 3 %.

Au Canada, la forte croissance démographique aide à pourvoir plus d'emplois. Le taux de chômage n'a pas bougé en 2023 par rapport au niveau exceptionnellement bas de 5,0 % à la fin de 2022. Et l'emploi a augmenté d'un quart de million au cours des quatre premiers mois de 2023. Cela stimule la production à l'échelle de l'économie, offrant des salaires et des revenus salariaux plus élevés pour aider à compenser la hausse de la dette et les coûts de l'inflation.

Une croissance démographique structurellement plus élevée rend plus difficile la contraction de l'économie en augmentant la consommation globale. Cela est particulièrement vrai sur les marchés du logement, où il est plus difficile pour la nouvelle offre de répondre rapidement à la demande croissante. Nous nous attendons toujours à ce que l'impact sur le pouvoir d'achat des ménages de la hausse des prix et des taux d'intérêt fasse finalement baisser le PIB, mais une forte croissance démographique sous-jacente rend plus probable que le ralentissement soit « léger ».

Malgré un début d'année relativement fort, nous nous attendons à ce que des vents plus frais modèrent la croissance dans toutes les provinces sauf une (Terre-Neuve-et-Labrador). Alors que la baisse des investissements devrait limiter la croissance économique en Colombie-Britannique (+0,6 %) et au Québec (+0,6 %) cette année, un secteur pétrolier et gazier à la traîne à Terre-Neuve-et-Labrador (+0,7 %) et la faiblesse des dépenses de consommation en Ontario (+1,1 %) maintiendront la croissance de ces provinces, bien qu'en deçà de la moyenne canadienne (+1,3 %). Bien qu'ils se soient modérés par rapport à leurs sommets de 2022, les solides marchés des produits de base sont sur le point de maintenir les provinces des Prairies du Canada en tête du classement de la croissance de cette année, l'Alberta prenant la tête (+2,4 %), suivie de la Saskatchewan (+2,0 %) et du Manitoba (+1,9 %). La croissance démographique supérieure à la tendance dans l'Est continuera de soutenir un marché du travail dynamique et des dépenses élevées, ce qui maintiendra la croissance du PIB réel à l'Île-du-Prince-Édouard (+1,7 %), en Nouvelle-Écosse (+1,5 %) et au Nouveau-Brunswick (+1,4 %) au milieu du peloton.

Il faudra plus qu'un rebond du marché de l'habitation pour empêcher l'économie de la Colombie-Britannique de ralentir considérablement cette année. Les grands projets d'immobilisations qui ont alimenté une activité considérable ces dernières années ont maintenant dépassé leur apogée ou se terminent, ce qui refroidit le secteur de la construction. Les taux d'intérêt plus élevés pèsent toujours sur les consommateurs de la Colombie-Britannique, les plus endettés du pays. En fait, les pressions financières accrues ont déjà commencé à peser sur les dépenses de consommation depuis l'automne. Nous nous attendons à ce que les vents contraires soient plus forts en Colombie-Britannique que dans la plupart des régions du pays, plaçant la province à l'arrière de notre classement de croissance cette année. Nous prévoyons que le PIB réel de la Colombie-Britannique n'augmentera que de 0,6 % en 2023, en baisse par rapport au taux de croissance de 3,6 % enregistré l'an dernier.

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Malgré un environnement économique qui s'assouplit, le marché du travail tendu de la Colombie-Britannique continue de maintenir la croissance des salaires au rythme le plus rapide au pays (+6,3 %). Et les taux de postes vacants persistent bien au-dessus des niveaux d'avant la pandémie. Toutefois, les fortes hausses salariales n'ont pas été suffisantes pour empêcher les consommateurs de se serrer la ceinture. Il ne fait aucun doute que la hausse des coûts du service de la dette et les graves difficultés d'abordabilité du logement sont les principaux facteurs qui freinent de nombreux Britanno-Colombiens. À la traîne derrière toutes les autres provinces, nous prévoyons que les ventes au détail grimperont cette année (+0,4 %).

Des taux d'intérêt plus élevés réduisent également l'appétit des entreprises à investir dans de nouveaux projets. La quasi-achèvement de grands projets existants (dont Kitimat LNG, l'autoroute 91/17) entraînera une baisse des dépenses en immobilisations. Selon la dernière enquête CAPEX de Statistique Canada, les entreprises ont l'intention d'investir un total de 50 milliards de dollars en 2023 dans la province, une baisse de 3,3 % par rapport à 2022. La Colombie-Britannique est l'une des deux seules provinces où une baisse est prévue. Nous prévoyons que le ralentissement de la construction contribuera à un assouplissement général du marché du travail, faisant grimper légèrement le taux de chômage de la Colombie-Britannique de 4,6 % en 2022 à 5,3 % en 2023.

L'économie de l'Alberta est sur une lancée. L'année dernière, il a augmenté au deuxième rythme le plus rapide (+5,1%) du pays, et le début de 2023 ne semble pas différent. Le secteur clé de l'énergie de la province maintient une forte dynamique (malgré quelques perturbations causées par les incendies de forêt), la création d'emplois demeure solide, la population est en plein essor et les consommateurs ne se lassent pas encore. Bien que nous nous attendions à ce que la croissance ralentisse pendant le reste de l'année, le poids des taux d'intérêt plus élevés n'aura probablement pas le même impact sur l'économie de l'Alberta que sur les autres provinces. Nous nous attendons à ce que l'Alberta soit en tête de notre classement de croissance en 2023 avec un taux de 2,4 %. Les incendies de forêt massifs du printemps, cependant, présentent un risque à la baisse.

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Alimentée par l'effervescence des marchés des produits de base, la reprise économique de l'Alberta a attiré un nombre record de migrants entrants, poussant la croissance démographique parmi les plus rapides au Canada l'an dernier (+3,7 %). En plus de faire grimper les dépenses de consommation (les ventes au détail ont augmenté de 8,8 % par rapport à il y a un an au premier trimestre de 2023), l'afflux de migrants a contribué à remédier à certaines pénuries de main-d'œuvre, rééquilibrant le marché du travail de la province. L'Alberta a enregistré l'une des plus fortes hausses d'emploi (+3,7 %) au pays jusqu'à maintenant cette année. Pourtant, son taux de chômage a légèrement augmenté depuis le milieu de 2022, ce qui a contenu dans une certaine mesure les hausses de salaires (+3,1 %).

Malgré une consommation des ménages soutenue, le taux d'inflation de l'Alberta est demeuré le plus bas au Canada au cours du premier trimestre de cette année. Une forte hausse en avril (+4,3% a/a) l'a cependant ramené en milieu de peloton. Le programme de paiement d'accessibilité du gouvernement provincial (fournissant jusqu'à 600 $ aux personnes âgées, aux familles avec enfants de moins de 18 ans et aux autres Albertains dans le besoin) devrait aider à compenser une partie de l'augmentation du coût de la vie. Ces transferts ne devraient toutefois pas empêcher l'inflation albertaine de revenir à la cible de 2 % d'ici 2024.

L'économie de la Saskatchewan s'est remise sur pied. Il a dépassé toutes les autres provinces en 2022 – après une récession de deux ans – et il continue de montrer des signes de vigueur jusqu'à présent cette année. Les marchés robustes des produits de base – et leurs perspectives à plus long terme prometteuses – attirent d'importants investissements dans le secteur minier, ce qui alimente d'importantes retombées dans d'autres secteurs. Mais la province ne sera pas à l'abri du refroidissement généralisé des économies nationales et mondiales. Après une forte augmentation l'an dernier, les perspectives à court terme de la production minière se sont assombries. Les prix des produits de base ont quitté les sommets cycliques, incitant les producteurs provinciaux à réduire leur production. En effet, la production minérale est en baisse de 10 % par rapport aux niveaux d'il y a un an. Nous pensons qu'il s'agira d'un ajustement temporaire. En tant que tel, nous prévoyons que la croissance ralentira considérablement à 2,0 % cette année, par rapport à un sommet de près de dix ans de 5,7 % en 2022. Cela placerait toujours la Saskatchewan près du sommet de notre classement de croissance pour 2023.

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En tant que province canadienne productrice de potasse, la Saskatchewan profite fortement de la demande mondiale croissante d'engrais. L'invasion de l'Ukraine par la Russie l'année dernière a encore renforcé la province en tant que premier fournisseur mondial de ce produit de base, déclenchant une nouvelle série d'investissements massifs pour accroître la capacité. Nous pensons que ce sera un catalyseur de croissance pour les années à venir. Et le coup de pouce n'aurait pas pu arriver assez tôt. Malgré le rebond de l'an dernier, l'économie de la Saskatchewan ne s'est toujours pas complètement remise des contractions consécutives provoquées par les fermetures pandémiques en 2020 et la sécheresse en 2021. En fait, nous nous attendons à ce que l'activité économique cette année dépasse enfin son niveau de 2018.

Une forte reprise dans les secteurs agricole et manufacturier alimente une poussée des exportations du Manitoba. Les principaux secteurs axés sur le marché intérieur continuent également de tourner à plein régime grâce à la demande refoulée des consommateurs et à une solide activité de construction non résidentielle. Celles-ci ont plus que compensé une baisse de l'investissement résidentiel pour l'instant. Mais nous pensons que la compensation deviendra plus mince à mesure que la demande extérieure et intérieure se refroidira. Nous prévoyons que la croissance économique provinciale ralentira, passant de 3,9 % en 2022 à 1,9 % cette année, devant la moyenne nationale de 1,3 % pour une deuxième année consécutive.

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Les Manitobains ont accepté les hausses de taux d'intérêt sans hésitation. Leur endettement relativement faible a amorti le coup, de sorte qu'ils sont restés concentrés sur le rattrapage du temps perdu lorsque les possibilités de dépenses ont été réduites plus tôt dans la pandémie. Mais nous prévoyons que cette demande refoulée s'épuisera bientôt. Les consommateurs sont susceptibles de devenir plus prudents à mesure que des signes de faiblesse économique se manifestent. Les premiers signes incluent une baisse des prix des principaux produits agricoles (comme le canola et le blé) par rapport aux sommets de l'été dernier et une croissance de l'emploi plus faible ces derniers temps (en hausse de seulement 1,0 % par rapport à il y a un an en avril). C'est particulièrement le cas dans le secteur agricole, où le nombre de travailleurs a chuté de 32 %. Toutefois, les perspectives pour l'agriculture ne sont que plus sombres si on les compare au rebond fulgurant de l'an dernier (le PIB réel du secteur a bondi de 22 %). Néanmoins, nous pensons que les tensions géopolitiques persistantes sont susceptibles de maintenir la demande d'exportations du Manitoba à un niveau sain au cours de l'année à venir, contribuant ainsi à la croissance modeste continue de la province.

L'économie de l'Ontario a pris beaucoup de vitesse au cours des deux dernières années, ce qui a continué d'alimenter la croissance au cours des premiers mois de 2023. La hausse des taux d'intérêt a considérablement refroidi le marché de l'habitation et freiné les dépenses de consommation, mais leur impact plus large ne s'est pas encore fait sentir. Nous pensons que cela est sur le point de changer. Nous nous attendons à ce que la hausse des coûts du service de la dette freine la demande de biens et de services ontariens tant au pays qu'à l'étranger pendant le reste de l'année. Dans l'ensemble, nous nous attendons à ce que la croissance ralentisse considérablement à 1,1 % en 2023, contre 3,6 % en 2022.

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Très endettés, les Ontariens ont été parmi les premiers à réagir aux hausses de taux agressives de la Banque du Canada. Les dépenses de consommation se sont stabilisées au second semestre de 2022, mais pas la dette des ménages. En fait, les dettes hypothécaires ont grimpé de près de 10 % l'an dernier, ce qui a fait grimper le ratio de la dette au revenu disponible des ménages de l'Ontario de 8 points de pourcentage supplémentaires pour atteindre le chiffre stupéfiant de 203 %. Alors que les taux d'intérêt atteignent leur plus haut niveau depuis 22 ans, nous nous attendons à ce que les paiements au titre du service de la dette accaparent une part croissante du budget des ménages. Nous pensons que cela incitera de nombreux Ontariens à se serrer davantage la ceinture. Le fait que les ventes au détail aient augmenté à l'un des taux les plus faibles du pays au premier trimestre (hausse de 1,7 % par rapport à il y a un an) est conforme à ce point de vue.

À moyen terme, la construction de plusieurs projets d'immobilisations d'envergure alimentera une activité de construction non résidentielle vigoureuse au cours des prochaines années. Bon nombre d'entre eux sont liés à la production de véhicules électriques et de batteries (y compris d'énormes usines de batteries de véhicules électriques à St. Thomas et à Windsor), ainsi qu'à l'infrastructure de transport. Les intentions d'investissement en immobilisations ont légèrement augmenté de 4,6 % cette année.

Les perspectives à court terme ne sont ni réjouissantes ni sombres au Québec. Nous pensons plutôt que l'économie provinciale est entrée dans une période de stagnation qui pourrait inclure une légère contraction plus tard cette année. La chute de l'investissement résidentiel et la modération de l'activité dans les secteurs de la fabrication et des ressources ont déjà ralenti l'élan depuis le milieu de 2022. Les industries de services seront les prochaines à être prises dans les vents contraires. Certains de ces services (par exemple, les services professionnels et techniques et les soins de santé) pourraient avoir atteint un plateau plus tôt cette année. Nous prévoyons une croissance minimale de 0,6 % dans l'ensemble en 2023, marquant un net ralentissement par rapport aux solides progressions de 6,0 % et 2,6 % enregistrées au cours des deux dernières années, respectivement.

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Le tableau est mitigé à ce stade, c'est le moins qu'on puisse dire. Malgré le ralentissement dans certains secteurs, d'autres pans de l'économie québécoise continuent d'afficher une vigueur impressionnante. Le marché du travail par exemple reste extrêmement tendu (avec un taux de chômage de 4,1% effectivement à des plus bas historiques) et les ménages gardent pour l'instant les cordons de leur bourse grands ouverts. Pendant ce temps, les industries précédemment durement touchées comme les services de transport, les arts et le divertissement, ainsi que les services d'hébergement et de restauration font de nouveaux progrès significatifs vers une reprise complète. Mais la marge de manœuvre dans ces industries diminue rapidement. Et le coup de pouce des transferts ponctuels du gouvernement provincial pour aider les Québécois vulnérables à faire face à la hausse du coût de la vie s'estompera également bientôt. Nous voyons ces facteurs pointer vers une faiblesse plus large au cours du second semestre de cette année.

Un secteur qui devrait bien résister au cours de l'année à venir est la construction non résidentielle. Les entreprises prévoient augmenter leurs dépenses en immobilisations de plus de 10 % au Québec pour atteindre un sommet de 60 milliards de dollars en 2023, près des deux tiers des dépenses étant affectées à la construction de structures non résidentielles. Les infrastructures publiques (y compris le transport en commun, les routes et les tunnels) continueront d'occuper le devant de la scène, mais les dépenses des fabricants et des services publics représenteront également des parts importantes.

La croissance économique a nettement ralenti l'an dernier à 1,8 % contre 5,9 % en 2021, entraînée par le déclin du secteur manufacturier et des principales industries de services. Nous prévoyons une nouvelle décélération modeste en 2023, car les consommateurs nationaux et étrangers subissent une pression croissante. Nous prévoyons une croissance de l'économie provinciale de 1,4 % cette année.

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Le fléchissement de la demande extérieure et la volatilité des prix des principaux produits d'exportation provinciaux pèsent sur les exportations (nominales) de la province cette année. Les exportations de marchandises ont légèrement diminué de 0,1 % au premier trimestre par rapport à la même période l'an dernier. Ces vents contraires continuent à leur tour de peser sur les fabricants provinciaux dont les ventes ont chuté de 3,2 % au premier trimestre. Nous ne prévoyons pas de revirement important pour le secteur au cours du reste de l'année alors que les économies américaine et canadienne se dirigent vers une récession.

Toutefois, le marché du travail du Nouveau-Brunswick demeure solide à ce stade. La création d'emplois est toujours à la hausse et le chômage continue de baisser, atteignant un nouveau plus bas historique de 5,8 % en mars. Alors qu'une vague de migrants a contribué à accroître et à rajeunir son bassin de main-d'œuvre, la province est toujours aux prises avec une main-d'œuvre relativement âgée. L'âge médian au Nouveau-Brunswick (45,7 ans) est le deuxième plus vieux au Canada après Terre-Neuve-et-Labrador.

Bien que l'économie de la Nouvelle-Écosse ait augmenté l'an dernier à la moitié de son rythme (frénétique) de 2021, la performance pourrait difficilement être qualifiée de faible. Le taux de 2,6 % atteint était encore largement supérieur à la moyenne de 1,9 % des cinq années précédant la pandémie. Des niveaux records d'immigration ont fait des merveilles pour les dépenses de consommation et l'investissement résidentiel, et ont amélioré le marché du travail de la province. Cependant, alors que les tendances démographiques favorables continueront de stimuler l'économie provinciale cette année, nous nous attendons à ce qu'un ralentissement de l'économie mondiale et des taux d'intérêt plus élevés s'avèrent plus difficiles. Nous prévoyons que la croissance se modérera encore à 1,5 %, toujours en dehors du territoire de la récession, dans un contexte d'affaiblissement de la demande d'exportations et de biens et services nationaux.

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Il pourrait y avoir des signes avant-coureurs que le ralentissement de l'économie assouplirait les conditions du marché du travail. Le chômage en Nouvelle-Écosse a bondi de 26 % depuis qu'il a atteint son plus bas niveau en quatre décennies en janvier, portant le taux de chômage au troisième niveau le plus élevé (6,3 %) parmi les provinces en avril. Il y a également moins de postes vacants, les postes vacants ayant diminué de 15 % par rapport à il y a un an.

On s'attendrait à ce que tout ralentissement soutenu du marché du travail déclenche une boucle de rétroaction négative, amenant les consommateurs de la Nouvelle-Écosse à restreindre de plus en plus leurs dépenses. Néanmoins, les fortes tendances démographiques sont sur le point de maintenir le coup économique plus modéré. Entre autres avantages, la vague de nouveaux arrivants a contribué à diversifier la composition industrielle de la province. Elle a alimenté une croissance phénoménale dans les industries de services (dirigées par les services professionnels, scientifiques et techniques) et a encore réduit la dépendance à l'égard du secteur des ressources, ce qui a contribué à renforcer la résilience économique.

Pour la première fois depuis 2018, le taux de croissance de l'Île-du-Prince-Édouard a été inférieur à la moyenne nationale l'an dernier à 2,9 %. Les ralentissements dans les secteurs de la construction, de la pêche et du commerce de gros, ainsi que le ralentissement de la croissance dans les secteurs de l'agriculture et de la santé ont freiné le rythme de l'économie. Mais ce n'était en aucun cas un résultat faible. Après la poussée de 2021, l'Î.-P.-É. constate enfin un retour au taux moyen observé au cours des cinq années précédant la pandémie. L'immigration record a contribué à soutenir la création d'emplois solides et à garder les consommateurs d'humeur dépensière. Nous nous attendons à ce que les conditions de récession en Amérique du Nord modèrent davantage la croissance du PIB réel à l'Î.-P.-É. cette année à 1,7 %.

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L'activité de construction continue de ralentir à ce stade par rapport à des niveaux historiquement élevés en 2021. L'investissement résidentiel est celui qui se corrige le plus - les mises en chantier ont diminué de 22 % par rapport à il y a un an au premier trimestre. Le développement non résidentiel n'a pas non plus fait preuve de beaucoup de résilience, les investissements dans les structures industrielles ayant chuté de plus de 40 % depuis le début de l'année par rapport à la même période l'an dernier. Alors que les taux d'intérêt élevés et les pressions persistantes sur l'abordabilité continuent de peser sur la construction, nous ne voyons guère de redressement pour le reste de cette année.

La province a fait face à un certain nombre de défis jusqu'à présent cette année. L'observation de deux baleines en voie de disparition ce printemps a perturbé la saison de récolte du homard, menaçant de réduire les prises de nombreux équipages. Et la grève des travailleurs fédéraux en avril a fortement perturbé le secteur de l'administration publique. Avec plus de la moitié des employés de la fonction publique de l'île hors ligne sur une période de deux semaines, les interruptions de travail pourraient laisser une marque sur la croissance de l'Île-du-Prince-Édouard cette année. Néanmoins, on s'attend à ce que le classement général de la province revienne au-dessus de la moyenne canadienne cette année. De bonnes perspectives pour le tourisme et une forte croissance démographique (la population de l'Î.-P.-É. augmente actuellement au rythme le plus rapide (+4,3 % au premier trimestre de 2023) au pays) compenseront largement le ralentissement dans d'autres secteurs de l'économie.

Terre-Neuve-et-Labrador a été la seule économie provinciale à s'être contractée en 2022, le secteur de l'énergie ayant diminué pour une deuxième année consécutive. Les développements récents dans les industries clés de la province suggèrent que Terre-Neuve-et-Labrador pourrait connaître une année plus molle en 2023 que nous ne l'avions prévu auparavant. Des perspectives plus sombres pour la production de pétrole, en particulier, jettent maintenant une ombre sur la reprise après la baisse d'activité de l'an dernier. En tant que tel, nous avons abaissé notre projection de croissance pour cette année à 0,7 % par rapport à notre prévision précédente de 1,6 %.

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Le secteur pétrolier de Terre-Neuve-et-Labrador connaît un démarrage décevant. La production de pétrole est tombée à son plus bas niveau au premier trimestre 2023 (19 millions de barils) depuis mi-2017. Les plans de reprise de la production du champ pétrolifère offshore de Terra Nova au deuxième trimestre de 2023 ont été annulés, sans date future d'extraction en vue. Et avec les projets West White Rose encore dans deux ans, il est peu probable que l'écart de production soit comblé avant la fin de l'année.

Mais les déboires de l'industrie pétrolière ne doivent pas complètement occulter de meilleures perspectives dans d'autres secteurs. Cette année, 5,3 milliards de dollars ont été promis pour des investissements dans des projets d'immobilisations dans la province, soit une augmentation de 7,1 % par rapport à 2022. Une forte augmentation des dépenses de l'industrie minière (hausse de 22 %) contribuera à stimuler l'économie, soutenant une croissance positive de l'emploi (+2,1 %) malgré l'achèvement tant attendu du projet hydroélectrique de Muskrat Falls. Les prix des minéraux se situant toujours bien au-dessus de leurs niveaux d'avant la pandémie, nous nous attendons à ce que le secteur minier soit un point positif pour la province au cours de l'année à venir.

Tableaux des prévisions du Canada et des États-Unis Lire le rapport

Tableaux des prévisions provinciales Lire le rapport

En tant qu'économiste en chef de RBC,Craig Wright dirige une équipe d'économistes qui effectuent des recherches sur l'économie, les titres à revenu fixe et les devises aux clients de RBC. Craig contribue régulièrement à un certain nombre de publications de RBC et joue un rôle clé dans la fourniture d'analyses économiques aux clients et aux médias par le biais des séances d'information économiques régulières du service des affaires économiques.

Nathan Janzen est économiste en chef adjoint, à la tête du groupe d'analyse macroéconomique. Il se concentre sur l'analyse et la prévision des développements macroéconomiques au Canada et aux États-Unis.

Robert Hougueest chargé de fournir des analyses et des prévisions sur le marché canadien de l'habitation et les économies provinciales.

Claire Fan est économiste chez RBC. Elle se concentre sur l'analyse macroéconomique et est responsable de la projection d'indicateurs clés, notamment le PIB, l'emploi et l'inflation pour le Canada et les États-Unis.

Rachel Battaglia est économiste chez RBC. Elle est membre du Groupe d'analyse macroéconomique et régionale, fournissant des analyses pour les perspectives macroéconomiques provinciales.

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